Frédéric Bonnaud : « Quelle est l’histoire du Territoire ?

Je rencontre Pierre Cottrell, qui était producteur de Jean Eustache, et il me donne de l’argent pour faire un “film chinois”. Il disait que faire un film en Chine, ça lui changeait la tête. J’ai commencé à travailler sur le seul projet hollywoodien que j’aie jamais eu, qui peut se raconter en trois phrases : un couple de vieux Chinois d’Amérique latine veut rentrer en Chine, ils louent un bateau qui prend l’eau et doivent s’improviser marins. Comme ils sont d’une grande sagesse, ils arrivent en Chine… Et voilà. Cottrell était enthousiaste, il achète des billets pour Hong-Kong, et je me retrouve à écrire le scénario, enfermé à l’hôtel. Comme j’avais du mal à avancer, j’ai écrit plusieurs traitements pour me dépayser un peu. Parmi eux, une histoire de cannibalisme. Cottrell voulait montrer le scénario à Corman, qu’il connaissait. Entre-temps, on s’est aperçu que tourner en Chine, c’était pas si évident. Je rentre à Paris, il m’appelle : “Corman accepte ! Il donne 300 000 dollars.” A ce moment-là, Paolo Branco se lançait dans la production et nous propose de tourner le film au Portugal, avec des comédiens américains. Et puis Corman a changé d’avis et ne donnait plus que 10 000 dollars ! Moi, je vivais avec l’argent que me donnait Cottrell pour faire le “film chinois”. C’était mal parti mais Branco insiste ¬ il était alors en train de produire Francisca d’Oliveira. Celui-ci avait alors la manie de faire des plans de cinq minutes, il devait donc changer de bobines à chaque plan. On a fait notre film avec la pellicule non utilisée à la fin de chaque bobine (…) » 

Raoul Ruiz, «Trois vies et une seule mort»   lesinrocks.com, 22 mai 1996 
Article complet sur http://www.lesinrocks.com/1996/05/22/cinema/actualite-cinema/trois-vies-et-une-seule-mort-11233623/

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